Le mot du jour de Denis Cristol



Lorsque l'on évoque les nouvelles façons d'apprendre on embraye aussitôt sur l'idée qu'il existe un désapprentissage individuel. Qu'en est-il du désapprentissage collectif? Car selon la maxime "on apprend seul mais jamais sans les autres" on peut aussi se poser la question au niveau collectif, la formule consacrée serait alors :

On désapprend seul mais jamais sans les autres
La transformation des rapports au savoir passerait aussi par le collectif. Plusieurs dimensions collectives du désapprentissages sont touchées et s'expriment sous la forme de :
  • Rupture des routines dans l'organisation des informations non plus classées par arborescence d'experts a priori mais par usages produits par les indexations individuelles selon les situations et les besoins émergents (folksonomie)
  • Abandon de croyance sur le travail, le rapport aux autres ou au savoir comme source de "pouvoir sur" mais comme source de "pouvoir de"
  • Changement de postures et d'orientation; On passerait de la logique "je sais" à la logique "qui dans le collectif sait et peut me dire" (savoir distribué et relationnel favorisé par les accès en ligne à des bases de données)
  • Enrichissement de gestes individualistes de métiers et intégration de gestes plus collaboratifs favorisés par les possibilités de contact rapide
  • Destructuration de repères collectifs dans les modes de coordination, avec de nouvelles formes de coordination en complément : le passage d'une hétéro-coordination à une socio-coordination (un seul organise mais plusieurs s'harmonisent)
  • Avec des transformations dans les façons d'agir : restructuration des réseaux neuronaux individuels et collectifs (selon la théorie des neurones miroirs les réseaux neuronaux d'un individu sont affectés par certaines actions qu'il observe, si les façons d'interagir individuelle et collective se transforment, notamment par l'usage intensif de réseau en ligne et des multiples stimulations qu'ils produisent, les agencements neuronaux individuels mais aussi collectifs sont appelés à se transformer)
  • Réagencement des façons d'agir dans un système d'action au fur et à mesure que les actes valorisés se transforment et que les critères évoluent, l'efficacité au travail intègre de plus en plus la capacité à résoudre des problèmes inhabituels avec d'autres distants, ou en utilisant de nouvelles technologies collaboratives
  • Evolution du langage, qui peut admettre des formes verbales moins excluantes, les langages experts étant concurrencés par des langages performatifs qui expriment ce qui est vécu et non ce qui doit être
  • Les choix et la linéarité de l'action intègrent de la multi-activité, de la multi-référentialité (l'homme apprend de façon routinière à faire plusieurs choses à la fois en jonglant avec une multiplicité d'écran et de terminaux, il est pluri-actif, membre de plusieurs projets,engagé dans plusieurs tâches cognitives)
  • Déformation du cadre d'action imposé par un seul à un cadre sur lequel plusieurs agissent simultanément
Si ces tendances largement provoquées par l'irruption d'internet se mettent effectivement en place, le rapport au savoir s'établit en tendance de façon plus collective et risque à terme de faire apparaître une nouvelle forme d'apprenant qu'il est possible d'appeler des sociodidactes. L'écosystème de ces apprenants pourrait bien être les communautés d'apprentissages ou toutes formes de réunions où les intentions d'apprendre se mêlent intimement.

Les questions posées sur facilitation ou fédération s'adressent à tous ceux concerné par les collectif , j'ajouterai à la problématique :
* quid des formats de facilitation en groupe de pairs, au sein de la communauté, au sein d'un réseau?

* quelle différence entre facilitation à distance et en présence?
* y a t-il une dimension culturelle de la facilitation, si oui laquelle?
* quels préalables pour une facilitation distribuée, partagée ou tournante?
* quelles compétences? Quels savoir-faire pour une facilitation distribuée?
* quel lien entre gestion de son ego, gestion des rapports au savoir ou pouvoir dans la facilitation?
* faut-il un cadre pour faciliter la facilitation?
* qu'induit la dissymétrie (de rôle, de statut hiérarchique, d'expérience...) dans la facilitation?
* comment se former à la facilitation?
* quel est le rôle de la méthode et de la technique?
* la taille des groupes importe t-elle?
* faut-il être de la même structure ou extérieur à la structure d'appartenance du groupe pour faciliter? Quelles conséquences?
* que fait-on des contenus ? des expertises des uns et des autres dans la facilitation?
* existe t-il des outils numériques pour mieux faciliter?
* quelle différence entre fédération, médiation, formation, coaching et facilitation?
Si des spécialistes pouvaient compléter cette liste de questions, apporter des références bibliographiques et commencer à répondre cela ferait surement grandir l'intelligence collective et cela nous aiderait

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